mercredi 11 mars 2015

L'histoire de Lisieux en bref

Au lancement de ce projet, il me semble un bon exercice de résumer en un article l'histoire de Lisieux. Quitte à revoir complètement ma copie dans quelques mois. Un, deux, trois, c'est parti.

Lisieux n'est pas née avec sainte Thérèse au XIXe siècle. C'est au contraire l'une des plus anciennes villes de Normandie. Les Romains la fondèrent il y a environ 2000 ans pour en faire la capitale d'un peuple gaulois, les Lexoviens. On a cru que le site d'origine se trouvait sur Saint-Désir où les premiers archéologues ont reconnu les vestiges d'un théâtre et d'une agglomération. En fait, la ville antique occupait bien le centre-ville actuel, à proximité de la confluence de la Touques et de l'Orbiquet. Les fouilles archéologiques l'ont démontré même si malheureusement elles n'ont pas encore permis d'y mettre à jour de grands bâtiments publics (forum, théâtre, temple...) hormis des thermes (près de l'hôpital). Ça ne veut pas dire que les découvertes ont été minces à Lisieux. Bien au contraire. On a mis au jour une voie romaine et son revêtement dallé (entrez à la médiathèque pour la découvrir). On a retrouvé quelques fûts d'une colonne votive. On a surtout fouillé une grande nécropole sur le site Michelet (emplacement de l'IUT).

plan général de Lisieux à l'époque romaine
« Plan gallo-romain » de Lisieux par Habib M’henniTravail personnel. Sous licence CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons. Cliquez dessus pour l'agrandir.

Dans la seconde moitié du IIIe siècle, comme de nombreux autres villes de Gaule, Lisieux entoure son centre d'une muraille, un castrum car elle doit faire face aux invasions germaniques. Nous entrons ensuite dans la période la plus obscure de l'histoire lexovienne, grosso-modo des années 600 à l'an 1000. Les fouilles archéologiques apportent peu d'informations. Les textes sont peu bavards. Une tradition évoque un incendie par les Vikings. Seul point de lumière, Lisieux est une cité épiscopale. Autrement dit, elle est le siège d'un évêché. Un texte mentionne en effet un évêque, Theudobaudis (Thibaud ?) dès l'an 538.

Ce statut de capitale religieuse explique le développement de la ville au Moyen Âge. La présence d'un évêque implique une cathédrale, un entourage de clercs (les chanoines notamment), la concentration à Lisieux des revenus du diocèse. La ville noue des liens forts avec la religion. Déjà. Liens renforcés par l'implantation d'une abbaye à ses portes (Notre-Dame du Pré) et de deux couvents (les Mathurins et les Dominicains).

Quatre personnalités ou institutions se partagent le pouvoir sur la ville : l'évêque, les chanoines, les agents du roi et la commune (ancêtre de la municipalité). On imagine les conflits nés de cette autorité quadricéphale. En théorie, l'évêque est le plus puissant en vertu de son titre de comte de Lisieux. 


La Révolution sonne le glas de la longue domination de ces évêques-comtes de Lisieux. La ville perd son évêché, réuni à celui de Bayeux. Elle échoue à devenir le chef-lieu du département du Calvados et doit se contenter d'être chef-lieu d'un petit district (ancêtre de nos arrondissements). Mais germent déjà les moyens d'un renouveau. Depuis le XVIIIe siècle, Lisieux s'affirme comme un centre manufacturier. Sa spécialité : les draps. La Révolution Industrielle, dans la seconde moitié du XIXe siècle, fait naître des usines textiles qui utilisent l'énergie-vapeur pour mouvoir les machines. Toutefois, cette croissance économique se brise rapidement, broyée par la concurrence d'autres régions industrielles.

En 1900, Lisieux est un centre administratif et marchand que fréquentent quelques touristes. Car la cité, surnommée la "capitale du bois sculpté", a un certain charme grâce à ses maisons à pan de bois. Une voie royale vers l'assoupissement ? Non, deux événements bouleversent le destin de la ville. D'abord, le succès international d'un livre, Histoire d'une âme, écrit par une jeune carmélite inconnue, Thérèse de l'Enfant Jésus. Dès le début du XXe siècle, des pèlerins convergent vers la ville qui l'a vue grandir et mourir, Lisieux. La canonisation de Thérèse en 1925 renforce ce mouvement si bien que le pape commande la construction d'une monumentale basilique.

La chapelle Sainte-Thérèse dans la cathédrale de Lisieux (Laurent Ridel, Licence Creative Commons BY SA)

Deuxième bouleversement, les bombardements de 1944 qui détruisent 75 % des bâtiments (mais épargnent la basilique). Dans l'incendie des vénérables maisons à pan de bois, brûle aussi un destin touristique qui aurait pu ressembler à celui d'Honfleur. Lisieux revêt une nouvelle peau, celle d'une ville banale de la Reconstruction, faite d'immeubles en brique rouge.

Dans les années 1960 et 1970, face à la pression démographique, Lisieux se dote d'un quartier créé ex-nihilo sur le plateau Saint-Jacques, Hauteville. En raison de son importance (au moins 40 % des Lexoviens y habitent) et de son isolement du centre-ville, cette ZUP (Zone à Urbaniser en priorité) devient une véritable ville-bis.

Au bout de 2000 ans d'histoire, Lisieux est toujours là. C'est une ville moyenne, animée par ses activités commerciales mais malmenée par la désindustrialisation du pays et menacée par le déclin démographique (25 500 habitants en 1975, 21 200 en 2012). Malgré sa taille modeste, elle jouit d'une réputation internationale chez les catholiques et attend beaucoup de la fusion de la Haute et de la Basse-Normandie, elle qui se trouve, mieux que Caen, au cœur de la nouvelle région.

lundi 2 mars 2015

Mais pourquoi ce blog ?

Il y a plus d'un an que l'idée d'écrire un livre sur l'histoire de Lisieux me trotte dans la tête. Je faisais quelques recherches ; je lisais des articles de revue ; j'assistais aux conférences de la société historique locale. Mais découragé devant l'ampleur de la tâche, je repoussais le commencement du projet. Vous connaissez cet état d'esprit : on se dit qu'on se mettra à la tâche dès qu'on aura le temps mais, comme le temps ne vient jamais, on n'avance jamais d'un pouce. 

Il faut donc forcer les choses. En publiant ce blog, je ne peux plus reculer : vous êtes témoins de mon projet. L'abandonner, c'est me désavouer publiquement.

Hope. 
Donc ce blog parlera de l'histoire de Lisieux. Ne comptez pas pour autant y lire, au fil du temps, les différents chapitres de ce livre en gestation. Ce blog s'apparente à un carnet de recherche. J'y publierai des articles sur l'avancée de mon travail, sur mes découvertes et mes interrogations. Vous y découvrirez des aspects inattendus de l'histoire lexovienne et la manière dont travaille un historien. Attendez-vous à des articles parfois inaboutis, pire erronés. Je vais forcément tâtonner dans un premier temps.

Mais grâce à ce site, vous entrez dans les coulisses de l'écriture d'un livre, un travail souvent solitaire et caché. Par l'intermédiaire des commentaires, vous pouvez même vous exprimer pour dire ce que vous aimez ou pas, pour poser des questions, pour corriger mes affirmations ou pour apporter votre grain de sel.

Afin que l'ouvrage qui en sortira renferme une partie de vous.